La finance décentralisée (DeFi) émerge comme un nouveau théâtre d'opérations dans la bataille mondiale pour la suprématie financière.
La finance décentralisée (DeFi) émerge comme un nouveau théâtre d'opérations dans la bataille mondiale pour la suprématie financière. Cette technologie disruptive, basée sur la blockchain, représente une menace directe pour l'hégémonie du système financier traditionnel et la domination du dollar américain mais aussi directement la souveraineté des états au travers de leurs banques centrales.
Dans les couloirs feutrés des banques centrales, l'inquiétude monte. La DeFi, avec ses protocoles automatisés et ses contrats intelligents, commence à éroder les fondements mêmes du système financier international. Les chiffres sont éloquents : plus de 100 milliards de dollars d'actifs sont désormais verrouillés dans ces protocoles, créant un système parallèle qui échappe au contrôle des régulateurs traditionnels.
Pour alimenter ces nouveaux mécanismes, 150 milliards de dollars ont été digitalisés sur les blockchains (pour environ 300 millions d’euros) par de nouveaux acteurs comme Tether aujourd’hui plus rentable que Blackrock.
Les implications géostratégiques sont considérables. La Chine, déjà en avance avec son yuan numérique, observe avec attention cette révolution décentralisée. Les États-Unis, soucieux de maintenir leur influence sur le système SWIFT, multiplient les initiatives réglementaires. Le gouvernement élu de Trump semble avancer vers une introduction des crypto-actifs comme BTC dans la Réserve fédérale et une droit constitutionnel à l’auto-détention. Entre les deux, l'Europe cherche à établir sa position en utilisant son approche habituelle basée sur la réglementation notamment à travers MiCA (Markets in Crypto-Assets), consciente que l'enjeu dépasse largement la simple innovation financière. La Russie et ses alliés pourraient accélérer le déploiement de systèmes monétaires alternatifs grâce à la blockchain.
Pour garder le contrôle sur les capitaux, les États sont entrés dans une course effrénée pour développer des champions d’infrastructures blockchain nationales, gage de contrôle sur le futur des échanges financiers. Les principaux exchange centralisés, acteurs privés régulés permettant l’échange entre les monnaies de banques nationales et les cryptos, lancent leur propre blockchain aux USA (Base chez Coinbase et Ink chez Kraken), la Chine avec OKX. Ces nouveaux géants, après avoir bâti des fortunes en quelques années en donnant l’accès aux crypto au grand public, créent leur propre système numérique de conservation et d’échange d'actifs numériques.
À l'horizon 2025, nous pouvons anticiper une intensification des tensions autour de la régulation de la DeFi. Les États chercheront à reprendre le leadership sur les standards d’échange internationaux mais la nature décentralisée de ces systèmes rendra la tâche particulièrement complexe. La vraie bataille se jouera probablement sur le terrain de la gouvernance algorithmique et de la standardisation des protocoles. Les volumes augmentant, la capacité à taxer ces flux sera pour les États une question de survie de leur modèle économique.
La finance décentralisée n'est pas qu'une simple innovation technologique - c'est un nouveau paradigme qui redéfinit les rapports de force économiques mondiaux. Les nations qui sauront maîtriser et encadrer cette technologie disposeront d'un avantage stratégique considérable sur les capitaux dans un monde ou la finance “non bancaire” ou “shadow banking” représente déjà plus de la moitié des actifs financiers.